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12 juillet 2012 4 12 /07 /juillet /2012 07:11

Le sommeil est réparateur c’est une chose entendue, mais reconnaissons bien que nombre de paramètres entrent en jeu dans la qualité supposée d’une nuit salvatrice. Il va s’agir de trouver le juste équilibre, l’accord parfait entre les contraintes, les paramètres, les bases et les principes interconnectés permettant d’appréhender la garantie d’un sommeil sinon profitable du moins apaisé. Ce qui est sûr en tout cas, c’est que ce soir je suis bien décidé à mettre toutes les chances de mon côté pour arriver sans dommages jusqu’à l’aube et du coup je rebois un dernier verre tout en pensant que l’épuisement qui m’étreint est certainement mon meilleur allié. Nous venons effectivement de passer la journée à bord d’un véhicule muni d’un moteur et de quatre roues, certes confortable, mais véhicule tout de même. Les 12 heures de routes que j’accuse ne sont pas sans séquelles et mon dos me fait dire, par le biais d’une douleur lancinante et profonde, que je dois absolument me résoudre à aller me coucher enfin. Mais nous sommes en vacances et l’ivresse du bonheur d’être loin de tout et avec ceux que j’aime m’invite à retarder l’heure du coucher pour profiter du bien être d’une soirée d’été à l’ombre des figuiers et autres vignes et arbrisseaux qui nous font grâce d’une fraîcheur tout à fait bienvenue. La maison d’ingrid, notre amie et maîtresse des lieux, est vraiment très agréable puisqu’elle nous offre le luxe d’une vue sans vis-à-vis et une perspective lointaine sur le viaduc de Millau. Mais la fatigue et l’envie d’aller se coucher étant plus fortes que le reste nous décidons d’aller enfin rejoindre nos lits. Ingrid nous mène à nos chambres, et nous découvrons avec joie le confort cosy qui va nous aider sans nul doute à prendre tout le repos nécessaire pour attaquer nos vacances de la meilleure des manières. Antoine dormira dans une chambre mitoyenne de la nôtre séparée par deux portes et à peine plus d’un mètre de couloir. Ingrid nous offre l’avantage et le privilège de sa propre chambre et nous sommes Daniela et moi ravis et sincèrement touchés. Dans le but de nous offrir le meilleur confort nocturne il nous est conseillé d’observer quelques règles sommaires. L’une d’elles consiste à prendre en compte le paramètre « chats ». En effet la maison est équipée de deux félins redoutables de gentillesse que je nommerai Consuelo et Géronimo pour meilleure compréhension de l’histoire que je suis en train de vous narrer.

Ainsi, notre tranquillité au cours de la nuit à venir mais aussi des autres dépendra de deux petits détails très simples mais qui ont leur importance. Le premier consiste à ne surtout pas ouvrir la fenêtre de la chambre sous peine de voir débarquer nos deux amis à quatre pattes au sein de notre nid douillet. La seconde étant de respecter coûte que coûte la première sans quoi je me verrai sans doute condamné à un  déséquilibre mental certain sauf si bien entendu je souhaite engager mon intimité léthargique avec Consuelo et Géronimo.

Nous nous couchons donc, Antoine dans sa chambre, Daniela et moi dans la nôtre. Fenêtre fermée. Porte fermé. Je suis bien. Ma colonne vertébrale va bien. Néanmoins un détail vient me perturber. Oui, un détail, un petit quelque chose, un rien du tout, une broutille… Il fait chaud, il fait lourd, et j’étouffe. Noyé sous ma couette mes narines cherchent un filet d’air en mouvement, des bribes d’oxygène auxquels je pourrais m’accrocher. Mais je pense à Consuelo et Géronimo et dans un soupir je me souviens des règles en vigueur ici et maintenant, alors je m’endors aussi sec. Vingt minutes plus tard je sursaute en panique car le réveil sonne déjà ! Je me dis que je n’ai jamais programmé le réveil pour qu’il sonne à cette heure stupide, et je m’aperçois très vite que faute de réveil la sonnerie en question n’est autre que la gorge de Daniela bien malheureusement encombrée d’une angine et m’offrant le privilège inattendu d’un sifflement rauque et effrayant oscillant au rythme irrégulier de ses respirations. Quelle chance me dis-je, et je me rendors aussi sec. Dix minutes plus tard je prends conscience que ce que j’imaginais être surmontable ne l’est pas du tout. A défaut de m’étouffer, à présent je ne respire plus du tout, je ne sais pas encore si je suis définitivement mort alors je me résous dans un réflexe ultime à céder au besoin d’ouvrir la fenêtre interdite et je m’arrache à notre lit confortable, et je me dirige vers la bouffée d’air qui me fera tant de bien, et je vois juste derrière le carreau le regard phosphorescent et inquisiteur de Consuelo attendant avec une impatience non dissimulée un geste de ma part qui l’inviterait à venir nous rejoindre. J’ai peur. Mais je suis courageux et presque mort alors j’ouvre la fenêtre et dis à Consuelo tout le bien que je pense d’une vie sans animal de compagnie et l’invite à me laisser respirer seul. Puisqu’il ne comprend pas un traitre mot de ce que je suis en train de lui dire je le pousse du revers de la main dans un soupir d’agacement et retourne me coucher. Ma position horizontale et l’air frais enfin présent dans ma cloison nasale me rendent joyeux et serein du coup je m’endors aussi sec !

Cinq minutes plus tard les travaux ont repris et me réveillent, mais en réalité je comprends très vite que les travaux en question se passent dans le système respiratoire de Daniela motivés par cette putain d’angine qui ne veut pas guérir malgré mon besoin de sommeil évident. Alors je me retourne pour tourner le dos au vacarme des marteaux piqueurs et Géronimo assis sur mon oreiller me fait face et me dit « miaou ». Je sursaute et j’ignore ce que signifie ce « Miaou » alors je lui dis « wouaf » et le raccompagne alors à la fenêtre et l’invite d’un revers de la main à ne plus jamais revenir dans les parages en pestant derechef.

Je retourne me coucher et constate que le chantier « angine » est en pause déjeuner puisque la respiration de Daniela s’apparente à un souffle enfin paisible. En passant je me dis pourvu que ça dure et je m’endors aussi sec.

Mon sommeil est à présent profond et me permet de pouvoir rêver à ma guise, ce qui est tout à fait normal à priori pour quelqu’un d’endormis. Alors il est question d’un groupe d’amis assez vague qui tentent de me faire comprendre que mon statut de maître du monde hyper séduisant n’est en réalité qu’une illusion, mais leurs multiples visages me semblent familiers et étranges à la fois, leur peau est couverte d’un poil long et soyeux, je crois reconnaitre la voix de l’un d’entre eux qui me pousse à tendre l’oreille un peu plus dans le but de l’identifier et de comprendre son message mais plus j’avance en sa direction et plus sa voix me semble lointaine malgré mes efforts et ce qu’il me dit me harcèle et m’obsède, je n’en peux plus car les autres tout autour de moi me regardent en se frottant contre mes mollets et se mettent à ronronner, mais la voix est de plus en plus claire, cette voix est un miaulement et j’ouvre alors les yeux et prend acte de mon cauchemar et je me gratte les cheveux car les miaulements viennent de derrière la porte de notre chambre et je reconnais le style et le phrasé de ce fichu Consuelo. Je suis un peu sur les nerfs, j’ouvre la porte, Consuelo semble content de me voir. L’ordure ! Je le ramasse, referme la porte, me dirige vers la fenêtre en grommelant des noms d’oiseaux adaptés à la situation, et je le balance par la fenêtre ! J’ouvre une petite parenthèse pour vous tous, amis des animaux, qui êtes en train de lire cette histoire. Je donne un détail important, ici la fenêtre donne sur le toit et par conséquent le fait de jeter le chat par celle-ci n’implique aucune chute du dit chat. Mais l’expression jeter le chat par la fenêtre me paraît approprié afin d’illustrer l’agacement et peut être même le désir de voir disparaître l’appentis au bénéfice d’un précipice sans fond ce qui aurait pour conséquence et avantage de voir disparaitre Consuelo dans une chute interminable et bienfaisante pour moi et mon sommeil. Mais je m’aperçois que la folie est à mes portes quand je me saisis d’un avion en papier et le jette en sa direction ce qui n’aura aucun effet sur la bête. La pause déjeuner est à présent terminée dans la gorge malade de mon épouse au bénéfice d’une reprise des travaux puisque le niveau sonores arrive à son paroxysme alors je décide de ne pas céder à la dépression et au lieu de pleurer je me couche et m’endors aussi sec.

Au bout d’une éternité, soit deux minutes et vingt-cinq secondes, je sens le poids et le mouvement de Géronimo, encore lui l’enflure, à mes pieds se frottant, s’installant, je suppose même se préparant à s’endormir à la faveur de mon propre corps physiquement à bout de force.  Je décide alors de passer sérieusement à l’action et d’en finir avec ce putain de chat à la con. Et d’un geste ultime, désespéré mais déterminé j’envoie un coup de pied circulaire digne d’un Jean-Claude Vandame afin de mettre un terme au harcèlement dont je suis la malheureuse victime d’un soir. J’esquisse un sourire idiot lorsque l’impact sourd se fait. Ma cible est atteinte !

C’est à ce moment très précis que la lumière s’allume et que Daniela me dit avec véhémence : « Non mais qu’est-ce qui te prend de me filer des coups de pied pendant que je dors ?!!! »     

Merde dis-je. La méprise est totale et bien malvenue puisque faute de punir un chat encombrant je viens d’assener un coup de latte en règle à ma propre épouse endormie et affaiblie par des travaux internes. Mais en arrière-plan juste à la fenêtre, par-dessus l’épaule de Daniela, mes deux chats terroristes Consuelo et Géronimo sont assis et me font face. Je les vois. Je les regarde et je comprends alors qu’ils ont au fond du regard et à mon endroit… le sourire aux lèvre.    

 

 

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